saint François, et la Création
... sous la plume de Bonaventure
Le Lac de Rieti

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- Un pêcheur qui lui faisait traverser le lac de Rieti pour aller à Greccio lui fit présent d’une poule d’eau, en témoignage d’affection.
Il l’accepta volontiers puis, ouvrant les mains, l’invita à reprendre sa liberté ; mais elle n’entendait point partir.
Le Père, les yeux au ciel, resta longtemps en prière et au bout d’une heure, comme s’il revenait de loin, redonna doucement à l’oiseau l’ordre de s’en aller et de louer le Seigneur.
Ayant obtenu son congé avec une bénédiction, elle prit son essor, exprimant bien sa joie par ses ébats.

Sur le même lac on lui offrit un magnifique poisson encore vivant ; il l’appela « frère », comme il faisait d’habitude, et le remit dans l’eau près de la barque.
Mais le poisson continua de frétiller joyeusement dans l’eau à la vue de l’homme de Dieu, comme s’il était sous le charme de son amour, et ne s’éloigna du bateau qu’il n’eût reçu la permission et la bénédiction du saint.

9. Traversant, un autre jour, les marais de Venise en compagnie d’un frère, il avisa toute une bande d’oiseaux logés dans les saules et chantant à tue-tête.
A ce spectacle, il dit à son compagnon :
« Nos frères les oiseaux louent leur créateur ; allons parmi eux pour chanter nous aussi nos heures canoniales et les laudes du Seigneur ! »
Ils s’avancèrent au milieu des oiseaux : pas un ne s’effaroucha.


Mais leur ramage devint assourdissant, au point que les frères ne s’entendaient plus l’un l’autre réciter les psaumes.
Alors le saint se tourna vers eux et leur dit :
« Mes frères les oiseaux, veuillez cesser vos chants jusqu’à ce que nous ayons rendu à Dieu les louanges qui lui sont dues. »


Ils se turent aussitôt et se tinrent en silence tant qu’il fallut, jusqu’à la fin de l’office et des laudes qui prennent bien du temps ; ils obtinrent ensuite du saint la permission de chanter et reprirent aussitôt leur babil accoutumé.

 

Une cigale, à Sainte-Marie de Portioncule, avait élu domicile sur un figuier près de la cellule de l’homme de Dieu ; son chant portait souvent à louer Dieu, le saint qui avait appris à admirer dans les plus petites choses la grandeur du Créateur.
Il l’appela un jour, et elle, comme stylée par Dieu, vint atterrir sur sa main ; il lui dit :

« Chante, ma sœur cigale, et loue par tes stridulations joyeuses le Seigneur qui te créa ! »


Obéissant aussitôt elle se mit à chanter et ne s’arrêta que pour s’en retourner à son arbre, sur l’ordre du Père.
Elle y demeura huit jours, venant, chantant et repartant au gré du saint qui dit enfin à ses compagnons :
« Donnons congé à notre sœur cigale : elle nous a suffisamment réjouis de son chant et provoqués huit jours durant à louer Dieu. »
Congédiée aussitôt, elle partit et ne revint jamais, comme si elle eût craint de désobéir, si légèrement que ce fût.
10. Le saint était malade à Sienne, un gentilhomme lui fit porter un faisan vivant qu’il venait de prendre, et l’oiseau, dès qu’il l’eut vu et entendu, s’attacha à lui avec tant d’affection qu’il ne voulait plus en être séparé.
Plusieurs fois transporté loin du couvent, dans une vigne, pour qu’il s’en allât s’il en avait envie, il revenait toujours à tire d’aile vers le Père comme s’il avait depuis toujours été nourri de sa main.
Confié plus tard à un homme qui venait souvent visiter par dévotion le serviteur de Dieu, mais comme attristé d’être ainsi séparé du Père au cœur aimant, il refusa obstinément toute nourriture.
Rapporté au serviteur de Dieu, il se livra, en le voyant, à de remuantes démonstrations de joie et mangea avec avidité.
 

11. Pendant un séjour qu’il fit à l’ermitage de Greccio, les habitants de la contrée subissaient désastre sur désastre des bandes de loups féroces, qui s’en prenaient non seulement au bétail mais encore aux hommes ; la grêle qui ravageait tous les ans les moissons et les vignes.

Les voyant si affligés, le héraut du saint Évangile leur dit un jour dans un sermon :

« Pour l’honneur et la louange du Dieu tout-puissant, je vous promets que le fléau s’éloignera et que Dieu, vous regardant avec amour, vous enrichira de biens temporels si, me faisant confiance, vous vous repentez, si vous avouez vos fautes et si vous faites de dignes fruits de pénitence . Je dois vous annoncer cependant que si, oublieux de ce bienfait, vous retournez à votre vomissement , le fléau reparaîtra, le châtiment doublera et la colère déferlera plus terrible sur vous . »

Ils firent pénitence, conformément aux exhortations de François, et à partir de ce moment les fléaux disparurent, les périls périrent, les loups et la grêle cessèrent leurs ravages. Bien mieux quand la grêle visitait les campagnes des alentours et s’approchait de leur région, elle s’arrêtait sur leurs confins ou prenait une autre direction. Les loups et la grêle respectèrent le traité du serviteur de Dieu ; ils n’osèrent plus sévir sans pitié au détriment de fidèles revenus à la piété, tant que, aux termes de l’accord, ceux-ci ne conduisirent point et impies contre les très saintes lois du Seigneur.
Greccio sous la neige
Nous devons donc prendre pieusement en considération la piété du bienheureux qui fut d’une douceur et d’une puissance si admirables qu’il domptait les bêtes féroces, apprivoisait les animaux des forêts, instruisait ceux qui sont doux par nature et arrivait à se faire obéir des bêtes pourtant rebelles à l’homme depuis le péché. C’est vraiment là cette piété qui, rendant amies toutes les créatures, est utile à tout et tient les promesses de la vie présente et de la vie future .

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